LA CÉRAMIQUE
La distribution de la céramique à UVEA suit l’occupation actuelle des sols. Ainsi, elle est abondante dans les zones de jardins actuels, ou sub-actuels, elle est rare dans le VAOTAPU, et pratiquement inexistante dans le TOAFA. On a pu distinguer trois types de céramique appartenant tous les trois à la même unité culturelle : le lapita. Ces trois types de poterie se retrouvent en stratigraphie dans la fouille du site MU 021 A à UTULEVE. Les résultats des datations C14 sur ces trois niveaux culturels UTULEVE I, II, III permettront quand ils arriveront d’avoir une chronologie précise de cette évolution. On pourra aussi, mettre en parallèle l’évolution des sociétés d’UVEA, par rapport à leurs voisins. Le lapita ancien, ou UTULEVE I, est connu à ce jour uniquement à UTULEVE dans un environnement géographique déjà observé pour les colonies lapita de Nouvelle-Calédonie, (FRIMIGACCI, 1980). Ils sont près d’une passe, sur une plage de sable et environnés de marécages.
Le lapita moyen, UTULEVE II, se retrouve en très faible proportion sur la côte Est d’UVEA, dans les zones à tarodières humides de la région de MATA UTU, tandis que le lapita récent, UTULEVE III, se retrouve partout, il correspond à l’horizon lapita récent non décoré de polynésie occidentale.
L’économie à la période du lapita ancien (UTULEVE I) pouvait être essentiellement basée sur l’exploitation des ressources du bord de mer et des marais. C’est la pression démographique qui aurait fait que les habitants se seraient peu à peu dispersés et installés sur toute la région, et ils auraient alors pratiqué une horticulture importante. Cette période débuterait avec le lapita moyen (UTULEVE II). On peut penser alors, que cela aurait opéré un changement dans le système social qui aurait eu pour effet d’intensifier encore plus les systèmes de production, les biens acquis prenant une part importante dans un système de redistribution hiérarchisé. L’apogée de ce système correspondrait à la période des forts d’UVEA et la population actuelle ne serait pas loin de ce modèle.
L’abandon de la poterie parait relativement récent à UVEA. On en trouve associée à presque tous les monuments qui s’intègrent dans une tranche d’histoire pour laquelle il y a des traditions. D’autre part, sur les îlots où le sol n’a pas été complètement bouleversé, on constate souvent une grande concentration de tessons de poterie en relation avec des villages abandonnés récemment et, pour lesquels il y a une “histoire orale”. C’est le cas pour l’îlot de NUKUATEA, (site MM 017, carte 27) où on retrouve encore très nettement sur le sol les emplacements de cases du village de MALAE, qui aurait été fondé et habité par le Chef de TEESI. La poterie y est très abondante à cet endroit même.
Le tableau n° 6 regroupe l’ensemble des bords des céramiques d’UVEA. On notera que beaucoup de ces profils, de bords sont partagés par les trois niveaux et que l’évolution va vers la simplification dans les décors et les formes. D’autre part, les formes générales, bien que sophistiquées dans le lapita de l’UTULEVE I, semblent rester globalement les mêmes. Ainsi, la répartition des tessons carénés est à peu près la même dans les trois niveaux, elle est de 0,84% dans l ‘UTULEVE III, de 0,92% dans l ‘UTULEVE II, et 0,88% dans l ‘UTULEVE I. Toutes ces poteries ont des caractéristiques communes et d’autres qui sont différentes. Si on a en mémoire les formes et les décors de ces trois types de poterie des niveaux UTULEVE I, II, III, on peut, avec les résultats des quelques analyses minéralogiques ajouter quelques remarques.
L’UTULEVE II qui est assez proche des formes rencontrées dans l ‘UTULEVE I (tableau n°6) se différencie de ce lapita ancien par le choix des argiles. Dans le I, on observe la présence évidente d’un dégraissant (introduit ou naturellement présent dans l’argile choisi) corallien.
L’argile pourrait avoir été extraite du marécage tout proche. Les poteries du II, et III se ressemblent et forment un groupe commun, car elles ont été faite avec une argile différente de celle du I, nécessitant une cuisson à plus haute température et peut-être une technique de fabrication différente, vraisemblablement le battoir. Le dégraissant corallien est absent des poteires du niveau III, et l’échantillon de la céramique du niveau II qui a été analysé n’en possède pas non plus,. mais d’autres échantillons en possèdent. Il semble donc que les poteries du niveau II tiennent une position intermédiaire entre celles du niveau I, et celles du niveau III. On remarque donc une dégénérescence progressive par rapport au modèle ancien UTULEVE I.
Pour l ’UTULEVE I, on pourrait dire que cette poterie a été construite à UVEA, avec une technique "importée”, c’est à dire possédant les caractéristiques générales et communes au lapita ancien comme la présence de sable corallien dans le dégraissant. Par contre, les poteries de l ’UTULEVE II et III ont été construites avec une technique "locale”, adaptée à l’île.
ANALYSE MINERALOGIQUE DE LA POTERIE D’UVEA.
Des analyses minéralogiques ont été pratiquées sur quelques tessons d’UVEA par J.C. GALIPAUD (tableau n° 7 et planche photo 6). Ces analyses sont insuffisantes pour exprimer des généralisations, cependant, elles vont dans le sens de notre recherche. Cinq tessons choisis dans les collections de poterie des sites prospectés et fouillés par D. FRIMIGACCI à UVEA et un tesson provenant du site de VELE à FUTUNA ont été analysés par la méthode des lames minces. Les résultats exprimés en pourcentage sont figurés dans le tableau n° 7 ci-dessous.
Planche photo n° VI
LEGENDE DE LA PLANCHE PHOTO N° 6
Lames minces de quelques céramiques d’UVEA et de FUTUNA
Les échantillons A, B, C, D et E ont été photographiés sous lumière polarisée. Les mêmes échantillons A1, B1, C1, D1, E1, ont été photographiés sous lumière non polarisée.
échantillon A : site MU 021 A niveau UTULEVE I, échantillon B : ramassage de surface sur le site de VELE à FUTUNA, échantillon C : site MU 021 A niveau UTULEVE II, échantillon D : ramassage de surface site de MU 06 niveau UTULEVE III, échantillon E ramassage de surface, site MU 046 niveau UTULEVE III.
MINÉRAUX PRINCIPAUX | ÉCHANTILLONS | ||||
---|---|---|---|---|---|
A |
B |
C |
D |
E |
|
Calcite (corail) | 33,1 | ||||
Pyroxene | 7,1 | 5,6 | |||
Feldspath | 2,2 | 30,4 | 15,6 | ||
Olivine | 1,5 | 1,4 | 4,3 | 2,4 | |
Opaques | 3,5 | ||||
ciment volcanique indiférencié | 100 | 95,7 | 82 |
Pourcentage des minéraux constitutifs, calculés sur la base de 1000 grains - tableau n° 7
Bien que représentatifs des ensembles considérés, ces cinq échantillons ne sauraient donner une vision globale de la situation de la poterie à WALLIS. Des études minéralogiques plus poussées, portant sur la totalité de l’échantillonage sont en cours.
L’échantillon A contient une quantité importante de sable corallien bien trié. Les pyroxènes (clinopyroxènes) sont également abondants. Les éléments sont liés entre eux par un ciment composé de verre volcanique altéré.
L’échantillon B contient en majorité des Feldspath et des pyroxènes (clino et orthopyroxènes).
Les échantillons C, D, et E sont caractérisés par un ciment volcanique opaque. Ils contiennent peu de minéraux, toujours de très petite taille (moins de cinq microns) à l’exception de l’échantillon E assez riche en petits cristaux de Feldspath.Les terres argileuses utilisées pour leur fabrication proviennent sans doute de la décomposition de cones de scories. Ces terres très hydratées sont peu plastiques et leur emploi, nécessite un mode de façonnage et de cuisson particulier.
En résumé, tous ces échantillons contiennent des minéraux constitutifs des roches volcaniques et il n’y a pas de raison de penser qu’ils puissent avoir une origine autre que locale.
On peut classer ces échantillons en deux groupes tenant compte de l’absence ou de la présence d’un dégraissant (naturel ou apporté)
Le groupe I représenté par l’échantillon A et dans une moindre mesure par l’échantillon B
Le groupe II représenté par les écnantilioris C, D, et E.
Les différences de pâte et de constitution des poteries de ces deux groupes sont, sans doute, la marque d’une différence dans les techniques de façonnage et de cuisson “ (J.C. GALIPAUD)